Le droit à l’avortement une question de société?

Chères communautés, comment allez-vous ?

Moi, ça va. Beaucoup de chamboulements au travail et dans ma vie privée, mais je suis ravie de vous retrouver. Promis, je ne resterai plus aussi longtemps silencieuse ?.

Et ça tombe bien, parce que j’ai tellement de choses à partager !


Premier sujet de la semaine : le droit à l’avortement.

Comme beaucoup d’autres pays africains, le Sénégal a signé le Protocole de Maputo. Ce texte, adopté par l’Union africaine, garantit entre autres aux femmes le droit à l’avortement en cas de viol, d’inceste ou lorsque la grossesse met en danger leur santé physique ou mentale. Pourtant, au Sénégal, ce droit reste lettre morte. Le refus d’appliquer ce traité repose sur des arguments divers, souvent religieux, culturels ou sociaux, mais rarement cohérents.

Ces derniers mois, le débat sur le droit à l’avortement a enflammé les médias et les réseaux sociaux au Sénégal. Entre déclarations chocs, amalgames et arguments biaisés, j’ai relevé plusieurs incohérences que je souhaite déconstruire ici.


1. L’argument religieux

Beaucoup invoquent la religion pour rejeter l’avortement. Pourtant, il est important de rappeler que :

  • Le Sénégal est une République laïque. La religion ne devrait pas dicter nos lois.
  • D’un point de vue médical, jusqu’au troisième trimestre, nous ne parlons pas d’un « bébé », mais d’un embryon ou d’un fœtus, dont la viabilité est encore incertaine.
  • D’un point de vue religieux, l’âme n’est pas insufflée avant un certain stade de développement (souvent estimé à 120 jours selon certains courants islamiques).

Donc, en réalité, ce débat n’a pas à être teinté de morale religieuse. Chaque individu répondra de ses propres actes devant Dieu. Ceux qui refusent d’appliquer cette loi n’ont pas à porter le fardeau des choix des autres. Dormez tranquille, vos propres actions suffiront à vous juger si vous êtes dans une logique de foi !


2. “L’enfant n’a rien demandé”

Certes, mais la femme ou la fille violée non plus.

  • En quoi un être potentiel, qui n’est pas encore venu au monde, devrait-il être plus important qu’un individu déjà existant, vivant et souffrant ?
  • La logique de « préserver une vie » ne tient pas ici. La femme brisée, humiliée et traumatisée doit porter le poids d’un acte qu’elle n’a pas choisi pour le « bien-être » d’une vie hypothétique.

La question est simple : pourquoi sacrifier une vie réelle et consciente pour une existence encore incertaine ?


3. “Mais il y a des femmes qui rêvent d’être mères !”

Et alors ? Ce n’est pas le débat.

  • Ces femmes veulent être mères dans des conditions choisies et aimantes, pas à travers le traumatisme d’un viol ou d’un inceste.
  • Cet argument ne sert qu’à détourner la conversation. Ici, il ne s’agit pas de combler un manque chez certaines, mais de redonner le choix à celles qui n’ont jamais eu leur mot à dire sur ce qui leur arrive.

Imaginer que ces femmes doivent garder une grossesse forcée pour satisfaire une société hypocrite est absurde. Laissez-nous gérer nos propres corps.


4. “Il faut préserver nos mœurs”

Cet argument est risible. De quelles mœurs parle-t-on ?

  • Dans un pays où les violences faites aux femmes sont minimisées et où l’histoire des droits humains reste méconnue, prétendre sauver un « meuble moral » inexistant est ridicule.
  • Si préserver les mœurs signifie maintenir un système patriarcal qui contrôle les corps des femmes, alors ce système est clairement obsolète.

Le vrai problème : une société patriarcale

Ce débat reflète surtout la manière dont nos sociétés restent profondément enracinées dans le patriarcat. Ce système enseigne aux femmes que leur corps n’est pas le leur, mais un terrain de décision publique où chacun a son mot à dire, sauf elles.

Et pire encore, certaines femmes éduquées défendent ces restrictions. Cela montre à quel point les normes patriarcales sont intégrées, même chez celles qui devraient être les premières à dénoncer ces injustices.

Le cas du Sénégal n’est pas isolé. Partout en Afrique, les arguments contre l’avortement sont souvent les mêmes : religion, culture, mœurs. Ils s’appuient sur des bases fragiles et émotionnelles plutôt que sur la logique, la science ou le respect des droits fondamentaux des femmes.

Souvent, je me demande si certains n’ont pas été bercés trop près des murs, car les incohérences sont trop flagrantes pour être ignorées.

Et moi ?

Je suis pour un droit à l’avortement sans condition. Pourquoi ? Parce que je crois que chaque femme doit être libre de décider ce qui est le mieux pour son corps, sa vie et son avenir.

Et vous, qu’en pensez-vous ? Soutenez-vous ce droit à l’avortement, au moins dans les cas d’inceste ou de viol ? Partagez vos avis. Ce débat est essentiel pour avancer.

Nana Triban

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